21. Mars 2024

(Auc)une porte de sortie

PHILIPPINES
Mon regard se baisse juste à temps pour que j’évite un rat mort sur le chemin. Puis j’aperçois un groupe de petits enfants qui marchent pieds nus dans les rues sales. Je suis dans les bidon- villes de Manille.

L’un de ces enfants porte un bébé nu dans ses bras. Le sien ? Puis je regarde le visage d’une jeune femme recroquevillée devant sa cabane faite d’ordures. Ses yeux sont sans espoir. Presque sans vie. Je dois détourner le regard.

Là où personne ne devrait vivre
Près de cinq millions de personnes vivent dans les bidonvilles de Manille. Si on peut appeler ça vivre. C’est là que vivent les plus pauvres parmi les pauvres. La plupart d’entre eux sont nés dans cette misère, ont grandi dans les ordures et la puanteur. Il n’y a guère de moyen de s’en sortir, car l’éducation coûte de l’argent aux Philippines. Et le recyclage des bouteilles en plastique et des pneus ou la vente des restes frits de nourriture dans les poubelles permettent tout juste de survivre un jour de plus.

Nous visitons notre centre social, qui se trouve au milieu des bidonvilles. Chaque jour, une quinzaine de bébés souffrant de malnutrition y sont pris en charge et nourris jusqu’à l’après-midi. Leurs mères ont ainsi une meilleure possibilité de s’occuper de leurs autres enfants ou de gagner un peu d’argent. Au deuxième étage, un groupe d’enfants d’âge préscolaire suit en même temps des cours. Ils sont très heureux de notre visite et nous chantent immédiatement une chanson : « I might be small, but my God is big, bigger than anything ». Leur rayonnement accompagne le message. Un contraste énorme avec l’ambiance étouffante du bidonville que nous venons de ressentir. Ces enfants ont l’espoir d’un avenir et apprennent ici que Jésus les voit et les aime.

Des bébés jetés
« Regarde, ce bébé a été trouvé aujourd’hui dans les ordures par notre assistante sociale. Il est maintenant soigné à l’hôpital et a de bonnes chances de survie. » Carsten Aust, notre collaborateur et chef de projets, me montre la photo d’un nouveau-né. Encore avec son cordon ombilical. Simplement jeté, comme s’il faisait partie du reste des déchets. « Merci, Seigneur, de nous avoir permis de sauver cette vie. Merci de l’avoir trouvé à temps », dit-il encore. Puis il nous raconte qu’un bébé a également été trouvé la semaine précédente. Malheureusement, trop tard. À l’hôpital, le petit être a rendu son dernier souffle.

Un amour et une affection authentiques
Nous passons notre première nuit aux Philippines à la House of Hope. C’est l’un des projets que nous menons pour faire face à une misère inimaginable. Le bâtiment est entouré d’une nature idyllique, loin des bidonvilles, des dangers et du bruit de la ville. Les enfants jusqu’à 4 ans y trouvent un nouveau foyer. La plupart d’entre eux sont orphelins ou arrachés à des conditions traumatisantes. Les nouveau-nés « jetés » sont également amenés ici. Dans la House of Hope, ils vivent avec leurs mères de substitution. Ces femmes investissent leur vie dans les petits : elles s’occupent d’eux, jouent avec eux et leur donnent un amour et une affection authentiques.

Le lendemain matin, nous sommes réveillés avant même la première sonnerie du réveil par les rires et les cris des enfants. Ils se sont levés tôt et s’affairent déjà à jouer et à découvrir. Ils accueillent aussi chaleureusement leurs nouveaux hôtes et tendent leurs petites mains vers nous, car ils veulent être soulevés et posés sur leurs épaules. Ils rient joyeusement et ne se distinguent pas des autres enfants de leur âge.

Perspective d’une vie autodéterminée
Nous nous mettons ensuite en route pour le Village de l’espoir. Après des années de fermeture des écoles à cause du Covid, la direction du projet a décidé de construire sa propre école sur le site. Celle-ci a été inaugurée le jour de notre visite. Nous sommes étonnés de voir à quel point les bâtiments et le terrain sont beaux et bien entretenus. Carsten nous explique que des soutiens viennent régulièrement de l’étranger, non seulement pour les dons, mais aussi pour donner un coup de main sur place.
Les enfants sont accueillis ici à partir de l’âge de cinq ans et sont accompagnés jusqu’à ce qu’ils soient capables de gérer leur vie de manière autonome après une formation ou des études. L’école donne aux enfants une formation et donc une perspective d’apprendre un métier à l’âge adulte et de mener une vie autonome en dehors des bidonvilles.

Inauguration de l’école
La grande excitation est palpable. Les enfants se sont parés de leurs plus beaux habits et nous montrent fièrement leur chic garde-robe. À midi, l’inauguration solennelle commence par un discours et des louanges. Après le repas, les enfants peuvent enfin montrer ce qu’ils ont répété pendant des semaines et nous impressionnent avec des danses et des chants créatifs. Et bien que la probabilité de pluie soit de plus de 90% aujourd’hui, les premières gouttes ne tombent qu’après que la dernière classe ait présenté sa contribution.

Des semaines après notre retour, je ne peux m’empêcher de penser au désespoir et à la misère qui règnent dans les bidonvilles. Les gens y vivent vraiment l’enfer sur terre. Je suis reconnaissante que nous puissions au moins en aider quelques-uns grâce à notre travail. Nos centres offrent une protection et un foyer à plus de 100 enfants. Mais je prie et j’espère que nous pourrons ouvrir à davantage de personnes une voie pour sortir de la misère et leur transmettre l’amour de Dieu.



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