Un voyage risqué
La courte pause prévue en Irak avant de poursuivre le voyage vers la Syrie s’est transformée en un examen de patience. En raison d’une attaque terroriste sur la base aérienne, le vol en hélicoptère de l’armée US vers Kobané a été annulé. Le second essai s’est heurté à des obstacles bureaucratiques sachant que nous autres Suisses, n’avons pas de représentation en Syrie. Après une semaine d’attente, il ne nous restait que la solution d’un voyage risqué de douze heures par la route.
Du côté syrien du Tigre, un véhicule d’assistance nous escorte avec une équipe d’agents de sécurité fortement armés à travers le désert entre les innombrables puits de pétrole, les fermes isolées et les troupeaux de moutons grignotant la verdure desséchée.
Rencontres surprenantes
Première étape dans une ville mal famée, où l’EI pourtant expulsé montre encore quelques signes de vie. Une ville truffée de barricades délimitant la frontière entre le territoire d’Assad et celui des Kurdes. Nous y faisons des rencontres surprenantes. Un audacieux prêtre en toge nous dit dans la rue : « Quand l’EI tenait encore la ville, une grande partie des chrétiens ont quitté le pays. Mais personnellement, je ne quitterai jamais la ville tant qu’il y aura des chrétiens. » Une femme (anciennement) musulmane nous sert du thé et nous confie : « J’ai perdu mes cinq premiers enfants parce que mon mari me rouait de coups durant mes grossesses. Dans ma détresse, j’ai crié à Dieu. Durant la nuit, Jésus m’est apparu en rêve. Il a posé ses mains sur mon ventre et m’a dit : ‹ Ton prochain enfant vivra ! › C’est ce qui s’est produit. Ma petite fille a quand même une malformation cardiaque. J’ai encore rêvé de Jésus. Je suis musulmane, mais je crois en Jésus ! »
Lors d’une rencontre avec les autorités de la ville, nous donnons à une femme kurde au poste à hautes responsabilités quelques réflexions chrétiennes. De façon surprenante, elle poursuit à son tour notre courte « prédication ». Les Kurdes sont très ouverts à la foi chrétienne, bien que cela représente un risque élevé dans ce pays, selon la région.
Sous protection divine
Nous poursuivons notre route entre ruines et villes détruites. Cette fois accompagnés d’un véhicule blindé. Dans une zone notoire, l‘équipe apprend que l‘EI contrôle la section de la route qui se trouve devant nous. Nous devons monter à bord du blindé. Le conducteur cherche nerveusement la bifurcation pour le contournement. Notre taux d’adrénaline grimpe. Ma femme m’avait partagé le soir avant une impression prophétique : « Vous êtes surveillés, un camion déverse du gravier devant vous, vous êtes obligés de faire un détour. » C’est très exactement ce qui se produit et cela nous donne du courage – Dieu est aux commandes de ce voyage.
À Kobané
Voir sur place ce que Dieu a accompli ces dernières années nous enthousiasme et nous impressionne : rencontrer les gens détruits par le terrorisme mais sauvés par Dieu, qui sont aujourd’hui en mission.
Sous escorte, nous retournons en Irak avec deux jours de retard. Un coffre plein des livres comptables de notre chef de projets, la caméra pleine de prises de vue et de photos, nos têtes remplies d’impressions inoubliables. Ce n’est qu’à la frontière que nous apprenons que les cinq jours suivants, le passage serait impossible en raison de la fermeture du poste de douane pour les fêtes musulmanes. Et que nous ayons pris l‘un des derniers vols au départ d‘Erbil avant cette pause, nous ne l‘avons appris qu‘en rentrant chez nous. Être à nouveau bloqués en Irak pendant plusieurs jours aurait probablement mis à rude épreuve notre patience déjà éprouvée – et celle de nos épouses, qui doivent déjà souvent se passer de nous.
